Cuillère en bois d’Alisier torminal (Sorbus torminalis)
J’ai eu la chance de sculpter cette cuillère en bois d’Alisier torminal dans une branche encore verte car, comme le précise la Flore forestière française, le bois de cet alisier est dense à très dense, dur. Ouf. La sculpture en a été facilitée. Le bois était tendre et très homogène. J’ai conservé la jeune écorce aux reflets argentés sur les bords supérieurs du cuilleron. Le manche est creusé, la cuillère – en forme de dose – reste légère de ce fait. Le grain du bois est très fin, le fini, réalisé au papier ponce extra-fin, très agréable au toucher.
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Dans la famille Rosaceae, genre Sorbus, je demande…
Cette cuillère en Alisier torminal est la 33e sculptée pour mon défi consistant à tailler autant de cuillères différentes qu’il y a d’essences d’arbres répertoriées dans la flore forestière française.
Parmi les proches parents de l’Alisier torminal, au sein du genre Sorbus, j’ai déjà récupéré ou sculpté :
- une cuillère en Alisier blanc (Sorbus aria) ;
- une cuillère en Alisier de Fontainebleau (Sorbus latifolia) ;
- une branche de Sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia).
Mais il me reste encore à trouver deux autres espèces :
- le Cormier (Sorbus domestica) ;
- l’Alisier de Suède (Sorbus intermedia).
Alisiers torminaux remarquables
Wikipedia indique qu’Avec une croissance relativement lente, le diamètre du tronc peut atteindre 50 à 65 cm en forêt à l’âge de 90-130 ans. Et en isolé, des spécimens ayant des circonférences entre 3 et 3,5 m sont attestés, certains disent que sa longévité est proche des 300 ans. La Flore forestière française indique une longévité d’environ 100 ans.
Alisiers remarquables en France
Le site Les têtards arboricoles cite un seul Alisier torminal remarquable, celui du Riolland, à Vernoux-en-Gâtine (Deux-Sèvres). Situé dans une haie, l’arbre côte à 23 mètres avec une circonférence à 1m30 de 2.55 mètres.
Le site www.arbres-remarquables-bretagne.org recense également un Alisier torminal remarquable, celui des anciennes forges de la commune de Paimpont : 18 mètres de hauteur et 2.73 mètres de circonférence.
Alisiers remarquables en Suisse
Michel Brunner, dans le magnifique livre Arbres géants de Suisse, présente le plus gros Alisier des bois de Suisse, à Möhlin, d’une circonférence de 2.40 mètres et d’environ 120 ans. Il indique également que dans le sud de l’Angleterre existent deux arbres d’une circonférence de tronc de plus de 4 mètres.
Connaitre et reconnaitre l‘Alisier torminal
Etymologie
L’Alisier torminal est également nommé Alisier des bois, Sorbier torminal, Allouchier. Le nom alisier dérive de alise, le nom des baies de l’arbre. Sorbus vient du latin Sorbere, boire bruyamment. L’adjectif latin, torminalis signifie bon pour les coliques. Les baies de l’alisier, Les alises, consommables après le premier gel, sont réputées pour leur capacité à traiter les coliques, diarrhées, dysenterie (du fait d’une importante teneur en tanins).
Distribution
C’est un arbre plutôt thermophile originaire d’Europe, Afrique du Nord et Asie Mineure.
En France, l’Alisier torminal est un arbre localisé de façon très éparse, plus rare dans le Sud-Est et absent en Corse. C’est un arbre de plaine qui ne dépasse guère 1000 mètres en montagne. S’il est quelquefois présent dans les haies, il est surtout présent en forêt, dans les hêtraies et chênaies.
Pouvant mesurer jusqu’à 33 mètres en forêt, mais plus souvent entre 15 et 25 mètres, l’alisier est en forêt généralement dominé par les autres arbres et, pour cette raison, il passe souvent inaperçu.
Identification
L’alisier torminal s’identifie par son écorce lisse brun orangé ou gris cendre quand il est jeune. Des lenticelles horizontales se déchirent et se détachent. Plus âgé l’écorce devient feuilletée, crevassée mais aussi très écailleuse et squameuse.
Il a des feuilles caduques vert foncé à 5 ou 7 lobes dentés. On le distingue des autres membres du genre Sorbus par ses grandes feuilles raides évoquant celles d’un érable ou un platane, des fleurs blanchâtres à nombreuses étamines donnant des fruits marron de 15 mm de diamètre comestibles à pleine maturité (après les premiers gels). Ces fruits sont très appréciés des petits mammifères, en particulier du blaireau (Meles meles) qui joue un rôle primordial dans la dissémination des graines (excréments enterrés contenants les graines) – Wikipedia
Le bois de l’Alisier torminal et ses usages
Que dit la Flore forestière française à propos de l’Alisier torminal ? Que c’est un bois très homogène, dense à très dense, dur, à aubier jaunâtre à blanc rougeâtre virant au brun-noir à l’air et à la lumière (…) bois se travaillant bien, prenant un beau poli, stable une fois mis en service ; bois très apprécié, ressemblant à celui du poirier, résistant aux frottements, utilisé autrefois en pièces de machines, navettes, ris, dents d’engrenage, rouleaux, pièces de pressoir, quilles, robinets peignes et merrains pour eaux de vie blanches.
Le livre cite divers usages actuels (lutherie, queue de billard, ébénisterie, tabletterie, crosses de fusils, bois de sculpture…) et indique que c’est aussi un très bon bois de feu ; excellent charbon de bois. L’Alisier torminal, par ses qualités, serait une des essences les plus chères de nos forêts.
Un peu d’ethnobotanique
Les alises (également nommées alosses) de l’Alisier blanc et de l’Alisier torminal sont comestibles mais amères et astringentes à l’état cru. Elles perdent néanmoins de leur âpreté après les premières gelées, comme les sorbes, et deviennent mangeables crues lorsqu’elles sont blettes. Néanmoins, elles restent fades et farineuses, moins goûteuses que les sorbes. Pascal Gérold, dans son livre Les arbres nourriciers, précise que les pépins (à l’instar de ceux de nombreux arbres de la famille des Rosacées) ne doivent pas être ingérés car ils contiennent de l’acide cyanhydrique. Les alises font cependant d’excellentes confitures, gelées et compotes. Pascal Gérold partage ses astuces pour le ramassage des alises :
- choisir des alisiers en lisières forestières, car ceux-ci développent des branches basses plus accessibles pour la cueillette ;
- ne pas hésiter à ramasser les alises au sol, elles seront bien mûres, sachant que la cuisson supprimera tout risque de contracter une parasitose.
Les fruits sont également utilisés en distillerie pour la réalisation d’eau de vie. Les anglais fabriqueraient une bière spéciale avec ces fruits. Pierre Lieutaghi [ Le livre des arbres, arbustes & arbrisseaux ] écrit : On en fait une boisson fermentée analogue au « curmé ». Leur distillation (les alises) donne une eau-de-vie, paraît-il excellente. Le curmé est un vin de cormes très ancien : l’une des premières boissons alcooliques de nos pays : on l’appelle « curmi » au Ve siècle, et ce nom survit dans l’irlandais « cuirm », bière. Le curmé de l’Ouest avait la réputation de porter à la tête et, à la longue, d’altérer gravement les fonctions intellectuelles. Vous trouverez la recette du cormé, le vin de cormes, sur le site www.associationcormier.fr
Magnifique sculpture, la présence d’écorces sur les bords de la cuillère lui donnent un aspect faussement « brut ».
La description de l’Alisier est très complète. Je vous souhaite du courage pour les suivantes !
MC